Peindre est pour moi un acte de recherche intérieure, une manière d’explorer le visible afin d’y faire affleurer ce qui s’y révèle. Je peins dans un état d’attention et d’écoute, sans idée préconçue, en laissant l’expérience sensible guider le geste. La peinture se construit ainsi comme un cheminement où chaque étape ouvre la suivante.

 

Mon travail s’élabore dans un dialogue constant entre la lumière, la couleur et la matière. Par superpositions, effacements et reprises successives, la forme apparaît, se transforme, puis parfois se dissout. Je produis une oscillation entre figuration et abstraction, entre maîtrise et abandon qui est essentielle car elle permet à la peinture de demeurer vivante, ouverte et traversée par l’incertitude.  « Ce que je fais m’apprend ce que je cherche » : chaque  toile est ainsi un espace d’exploration et de révélation.

 

Je ne cherche pas à représenter le réel, mais à en éprouver la présence. La couleur n’est pas descriptive ; elle est pensée comme une vibration, une respiration, capable de susciter une émotion plutôt que de livrer une image. Le geste pictural devient alors un moyen d’approcher une réalité intérieure, faite de silences, de fragilités et de résonances.

 

La nature, la poésie, la musique et le silence nourrissent mon travail. J’accorde une importance particulière au processus de création, aux phases intermédiaires, aux moments où la peinture hésite et se transforme. Les photographies d’étapes témoignent de ce temps de recherche, de ce lent mouvement d’apparition et d’effacement qui construit l’œuvre.

 

Chaque tableau est une invitation à la contemplation. Je souhaite qu’il conserve une part d’indétermination, laissant au regardeur la liberté d’y projeter sa propre expérience sensible. 
Cette manière de peindre fait écho à l’esprit de Guo Xi "ne  pas représenter un paysage, mais laisser apparaître un monde". Les  couleurs se déposent en couches comme des brumes successives, créant une  profondeur qui ne vient pas de la perspective mais du souffle. Les  masses qui se dissipent et se condensent, les lignes qui guident le  regard, tout cela vise à produire une atmosphère plutôt qu’une scène.  Comme chez Guo Xi, la peinture devient un espace intérieur : un lieu où  l’œil avance, se perd, puis revient, porté par une respiration plus  grande que lui.
 

Pour moi peindre consiste à se tenir sur cette ligne de crête  entre le visible et "l’invisible", entre le monde et ce qui le traverse.  Je pense que c’est là, dans cet espace d’incertitude, que la peinture trouve son sens.